Appel à projets de recherche 2024 / 2025 - « Précarité et santé mentale : rompre le cercle vicieux »


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Appel à projets

Appel à projets de recherche 2024 / 2025 - « Précarité et santé mentale : rompre le cercle vicieux »

alarm Lancement :

12/11/2024 à 12h00

schedule Clôture :

20/01/2025 à 23h59

public

Fuseau horaire : Europe/Paris

Conformément à ses missions statutaires de financement de programmes de recherche dans une approche pluridisciplinaire sur les questions d’exclusion sociale et de précarité, la Fondation Hospitalière pour la Recherche sur la Précarité et l’Exclusion sociale émet un nouvel appel à projets de recherche. La Fondation souhaite par cet appel à projets contribuer à faire émerger de nouvelles solutions pour améliorer la prise en charge des problématiques de santé mentale pour les personnes précaires.


L’ARS Ile-de-France, engagée pour la réduction des inégalités sociales de santé, en particulier dans le domaine de la santé mentale, soutient les actions de la Fondation depuis son lancement. L’ARS Occitanie a de son côté confié à la Fondation la responsabilité de mener un programme de recherche sur la thématique « aléas climatiques et précarité », dans une région doublement marquée par les situations de précarité et les phénomènes climatiques violents, qui peuvent créer chez les personnes précaires une forte sur-anxiété. 

Cet appel à projets prend également place dans le cadre d’un nouveau partenariat entre la Fondation et l’ARS Guyane, œuvrant sur un territoire où la prévalence des pathologies psychiatriques et des violences associées est particulièrement forte : l’orientation des travaux en lien avec la réalité guyanaise sera ainsi encouragée.


De nombreux marqueurs socio-économiques présentent un effet majeur sur la santé mentale, bien que les modalités d’action de ces facteurs de risque ne soient que partiellement élucidées. Il y a aujourd’hui consensus sur le fait que les problématiques de santé mentale et de précarité sont liées. Comme le résume le Dr François Lair, psychiatre au sein de l'équipe mobile psychiatrie précarité (EMPP) du Nord-Est de Paris, « La souffrance mentale et la précarité sont deux notions qui sont éminemment synergiques. Tel un cercle vicieux, la précarité peut générer des problèmes de santé mentale, qui eux-mêmes génèrent de la précarité ». L’association causale entre exclusion sociale et santé mentale se produit dans les deux sens : être socialement exclu augmente le risque de développer un problème de santé mentale, qui va renforcer l’exclusion sociale.


Dans le cas du sans-abrisme, se pose la question de savoir si ce sont les troubles psychiatriques qui tendent à le favoriser par effet de « dérive » sociale, ou si c’est l’exclusion qui est un facteur de troubles psychiatriques. Mais, si les interactions entre santé mentale et précarité sont complexes, il existe une majoration de la souffrance psychique au sein de la population en situation de grande précarité. En 2009, l’enquête Samenta, dernière étude de référence sur la population des personnes à la rue, mettait en lumière qu’un tiers des personnes sans domicile souffraient de troubles psychiatriques sévères, une prévalence dix fois plus élevée qu’en population générale. La double occurrence des addictions et des troubles psychotiques apparaissait au premier plan des problématiques de santé mentale liée à la précarité et l’exclusion sociale. Selon d’autres données internationales, la proportion de personnes sans domicile souffrant de troubles psychiatriques sévères s’élèverait même à plus de 75%, si on inclut d’autres troubles comme la dépression, l’anxiété ou le trouble de stress post-traumatique.


Une étude de Santé Publique France et de l'Assurance maladie montre que certaines pathologies psychiatriques sont également plus fréquentes chez les enfants issus de familles précaires, avec pour ceux-ci trois fois plus d’hospitalisations pour des problèmes psychiatriques. 6 sur les 10 maladies plus fréquentes chez ceux qui bénéficient de la CMUc (données de 2018) sont de nature psychiatriques : la dégradation de la santé mentale de ces enfants est directement liée à l’environnement familial ; « de nombreuses pathologies sont plus fréquentes en présence d’un désavantage social (surtout financier) ».


Autre population concernée : les personnes immigrées, en situation régulière ou irrégulière, qui présentent des effets psychopathologiques liés à leur parcours d’exil et ses traumatismes, comme aux conditions d’adversité sociale rencontrées dans les pays d’accueil, qui peuvent conduire à des troubles mentaux sévères. Une étude de 2020 conclut que les facteurs sociaux défavorables, auxquels les populations immigrées sont particulièrement exposées, jouent un rôle essentiel dans leur excès de risque de pathologies mentales.


En termes de capacité de production et de consommation, on peut noter que le risque d’être sans emploi en comparaison à la population générale est (en 2012, dans les pays de l’OCDE) deux à trois fois plus élevé pour les personnes présentant des troubles modérés de santé mentale, et six à sept fois plus élevé pour les personnes souffrant d’un trouble sévère de santé mentale. L’insécurité financière, accentuée par la période récente de forte inflation, et la détresse psychologique apparaissent liées ; les troubles anxiodépressifs sont bien plus fréquents parmi les ménages les plus en difficulté. Par exemple, 16% des personnes qui vivent « très difficilement » avec les revenus du foyer sont affectées de pensées suicidaires, contre 5% de celles qui vivent « facilement ».


Les personnes concernées qui cumulent ainsi les difficultés (vulnérabilités sociales et psychiques, problèmes somatiques, situations administratives complexes, non accès à l’emploi), rencontrent de multiples obstacles pour accéder aux soins et aux dispositifs sociaux et sont souvent stigmatisées. Et malgré l’existence de dispositifs d’aide et les diverses initiatives mises en œuvre aux niveaux national et local, les réponses apportées restent encore insuffisantes.



Par l’émission de cet appel à projets « Précarité et santé mentale : rompre le cercle vicieux », et alors que la santé mentale a été désignée comme Grande cause nationale en 2025, la Fondation Hospitalière pour la Recherche sur la Précarité et l’Exclusion sociale souhaite affirmer que lutter contre l’exclusion sociale des personnes souffrant d’un trouble de santé mentale est une priorité. Les constats suscités, sans intention d’exhaustivité, témoignent de l’urgence à identifier les processus et les actions mises en œuvre afin d’améliorer la qualité de vie des personnes, renforcer les dispositifs d’accueil et d’accompagnement, faire évoluer les approches.


En réponse à cet appel, une attention particulière sera accordée aux projets établissant une collaboration étroite entre recherche et action, des projets de recherche « sur l’action, pour l’action » :

- associations et fondations œuvrant pour la santé mentale des personnes en situation de précarité, se rapprochant ou s’étant rapprochées d’équipes de recherche, pour mettre en place ensemble des recherches appliquées ;

- chercheurs engagés sur ces problématiques, dans une diversité de disciplines, souhaitant porter des démarches de recherche en lien avec des acteurs de terrain qu’ils ont identifiés comme innovants.


Pour reprendre les éléments descriptifs de Santé Publique France, peuvent être notamment concernés la détresse psychologique réactionnelle (induite par les situations éprouvantes et difficultés existentielles), ainsi que les troubles psychiatriques plus ou moins sévères et/ou handicapants, dont les conséquences peuvent être majeures en termes de discrimination et exclusion.


Les projets de recherche pourront ainsi concerner, sans que ce soit exclusif : 

- une meilleure prise en charge des troubles chez les enfants en précarité extrême, notamment ceux qui sont à la rue, et les jeunes, notamment les étudiants ; 

- les personnes en souffrance psycho-sociale, dont les situations d’isolement social en ruralité ou celles des « travailleurs pauvres » impactés par les effets de l’inflation ;

- les phénomènes de violences (sexuelles, intrafamiliales…) et les traumatismes des populations précaires, associés aux problèmes de santé mentale ;

- les difficultés vécues par les populations précaires en raison des aléas climatiques subis, en particulier en Occitanie, et leurs répercussions importantes en terme de santé mentale. 


Les démarches « d’aller-vers » (et de « rester avec »), les approches qui construisent de nouvelles articulations, qui additionnent les savoir-faire, la co-construction de dispositifs où interviennent ensemble les acteurs du sanitaire et du social, seront particulièrement intéressantes à explorer.


Les projets peuvent concerner la région Ile-de-France ou d’autres territoires, en particulier l’Occitanie.

En lien avec le soutien de l’ARS Guyane, l’inclusion dans les travaux de terrains d’étude en Guyane, ou a minima l’évaluation (avec visite sur place) de la réplicabilité des résultats au contexte guyanais et à la population guyanaise, seront également recevables.


Enfin, de nombreuses situations alliant précarité et santé mentale étant prises en charge à l’hôpital de Nanterre, dans ses missions de soin, d’hébergement et de réinsertion, des projets de recherche en lien avec ces réalités seront accueillis avec le plus grand intérêt.